Remous à Bruxelles après une intrusion de Greenpeace

Remous à Bruxelles après une intrusion de Greenpeace

Le centre de crise du ministère de l'intérieur belge étudie en profondeur la manière dont onze militants de Greenpeace ont pu franchir, le 10 décembre, deux barrages, déployer des banderoles et lire un texte devant l'entrée du bâtiment officiel où se tenait le sommet des chefs d'Etat et de gouvernement de l'Union européenne (UE).


Les autorités belges comme les services du Conseil européen tentent de minimiser l'incident. Dans les coulisses, il suscite cependant beaucoup de remous et des questions, à Bruxelles comme dans certaines capitales, inquiètes pour la sécurité de leurs dirigeants. Parmi ces interrogations : que se serait-il passé si un mouvement plus radical avait imité les techniques, assez rudimentaires, utilisées par les activistes de Greenpeace ?

Les militants du mouvement de défense de l'environnement affirment avoir simplement photocopié des cartes d'accréditation délivrées par le Conseil aux journalistes couvrant le sommet. Ils y ont apposé leur nom et leur photo avant de revêtir des costumes stricts. Le minibus qu'ils avaient loué arborait, sur le tableau de bord, une carte portant la mention de leur organisation. En toute hypothèse, estiment-ils, ce véhicule n'aurait pas dû atteindre l'édifice où se tenait la réunion, même s'il était muni d'un gyrophare.

"J'aurais, au maximum, donné 5 % de chances à notre action", affirme Jona De Leye, porte-parole du mouvement en Belgique. Oliver Knowles, l'homme qui a lu une déclaration à destination des chefs d'Etat, estime quant à lui que son groupe était "clairement identifiable".

Ni la police de Bruxelles, qui dirige les 500 hommes habituellement affectés à la protection du quartier européen, ni la société privée Securitas, mandatée par le Conseil pour assurer la sécurité aux abords et à l'intérieur du bâtiment, n'ont remarqué la supercherie. La police affirme qu'elle procède généralement à des vérifications rapides au premier point de contrôle afin d'empêcher qu'un véhicule soit trop longtemps immobilisé, ce qui en ferait une cible facile pour un tireur. Securitas estime, elle, que son personnel a respecté les procédures et qu'il ne lui appartient pas de contrôler de près une voiture autorisée par des policiers à s'approcher du bâtiment.

Le porte-parole du bourgmestre (maire) de Bruxelles, Freddy Thielemans (PS), souligne qu'il faudra, à l'avenir, "éviter absolument ce type d'incident, sans toutefois transformer le centre de Bruxelles en une forteresse imprenable". Le premier ministre, Yves Leterme, a parlé d'une faute "compréhensible". Le porte-parole de la police de Bruxelles s'est attiré des quolibets en déclarant : "Si nous avions imaginé que quelqu'un était assez stupide pour créer une telle situation, cela ne se serait vraisemblablement pas produit." "Le concept de blague belge acquiert, ici, une nouvelle dimension", ironise l'éditorialiste du quotidien flamand De Morgen.

Jean-Pierre Stroobants
source : lemonde.fr