Submergés d'appels, les pompiers lancent un SOS

Submergés d'appels, les pompiers lancent un SOS

Confrontés à une explosion des demandes d'interventions, les soldats du feu ont vu leurs effectifs diminuer en 2011.

Le feu couve sous la cendre. À l'occasion d'un congrès national très attendu qui se tient jusqu'à samedi à Amiens, les sapeurs-pompiers de France tirent la sonnette d'alarme. D'abord parce qu'ils sont chaque jour davantage au bord de la surchauffe. L'année dernière, les soldats du feu ont dû faire face à quelque 4,24 millions demandes d'interventions, soit une explosion de 20 % depuis 2001.

Pour expliquer cette inexorable envolée des appels, les experts évoquent pêle-mêle le vieillissement de la population, l'urbanisation des campagnes, où les nouveaux arrivants conservent les mêmes exigences qu'en centre-ville, et aussi les derniers bouleversements climatiques à l'origine de la tempête Klaus qui avait balayé le sud-ouest de la France en 2009. Ou encore l'épisode meurtrier de Xynthia en 2010. «Face à la disparition de bon nombre de services publics de proximité et à la désertification médicale créant de véritables zones blanches dans certains endroits reculés où les urgentistes mettent parfois une demi-heure à arriver en dépit de leur bonne volonté, la population se retourne vers nousen composant le 18, assure le colonel Patrick Heyraud, secrétaire général de la Fédération nationale des sapeurs-pompiers de France (FNSPF).Nous sommes devenus le service public ultime.»

Pour répondre à cette charge écrasante, les soldats du feu doivent composer avec des effectifs en repli. Fort de 248.300 hommes et femmes engagés sur tous les fronts, ce corps, composé à 79 % de volontaires, a perdu 1400 personnels en 2011. Ce n'est pas encore la pénurie mais, depuis une vingtaine d'années environ, le volontariat est à la peine. Comme l'a révélé une étude du laboratoire Mana Lares de l'université de Rennes-II, la montée de l'individualisme et la remise en cause de l'idée de citoyenneté battent en brèche l'engagement. De plus, la priorité donnée à la vie familiale ainsi que la réticence des employeurs à libérer leurs salariés sur leur temps de travail dans un contexte économique tendu contribuent à tarir le flux des vocations.

«Jusqu'à un passé récent, l'arrivée de nouveaux pompiers professionnels comblait ce fléchissement des effectifs, mais les budgets corsetés des services départementaux d'incendie et de secours changent la donne, déplore-t-on à la Fédération nationale. L'un des pans entiers de notre sécurité est en passe de s'effondrer». «Nous avons l'impression de ne pas compter car nous ne dépendons pas de l'État mais des collectivités locales», s'est aussi insurgé le colonel Éric Faure, président de la FNSPF, rappelant que 57 % du financement des pompiers vient des conseils généraux et 43 % des communes. «Les acteurs locaux, qui gèrent les problèmes sur le terrain, ne sont pas associés aux décisions stratégiques prises à l'échelon national pour planifier les crises, martèle Patrick Heyraud. On a encore trop tendance à assimiler la sécurité des Français à la seule notion d'ordre et de tranquillité publique, alors que la Sécurité civile, avec ses 7 300 centres à travers la France, est au cœur du dispositif.»

Le ministre de l'Intérieur, Manuel Valls, devrait tenter d'apaiser les esprits en s'adressant samedi aux 3000 congressistes. «Nous allons tout faire pour défendre la précieuse notion de volontariat, socle de la Sécurité civile, et pour faciliter l'existence de ceux qui s'engagent chaque jour pour sauver la vie des autres», précise un conseiller de la Place Beauvau. Le ministre, qui s'est battu cet été pour obtenir une rallonge budgétaire pour la flotte des Canadair, n'ignore pas non plus le lourd tribut payé par les soldats du feu. Hier, il était à Gardanne aux obsèques d'Yvan Vignaroli, pompier volontaire de 59 ans mort mardi dans l'incendie d'un entrepôt, près d'Aix-en-Provence. Ce décès en service commandé est le sixième depuis janvier.

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