Des caméras dans les toilettes et les vestiaires des écoles britanniques

LONDRES (Sipa) — Au lycée King Ecgbert de Sheffield, dans le nord de l'Angleterre, les élèves ne sont jamais vraiment seuls, même aux toilettes. Des caméras les filment en permanence et tous les sanitaires de l'établissement sont placés sous vidéosurveillance.

Selon un rapport de Big Brother Watch, un mouvement de défense de la vie privée, plus de 200 lycées du royaume ont installé des caméras dans leurs sanitaires, mais aussi dans leurs vestiaires.

Ce document "va causer un choc à beaucoup de parents", affirme Nick Pickles, directeur de Big Brother Watch. "Les écoles doivent dire la vérité sur la raison de cette vidéosurveillance et sur ce que deviennent ces vidéos", ajoute-t-il.

Pour la directrice du lycée King Ecgbert, les caméras sont là pour assurer la sécurité des élèves. "C'est une façon de protéger nos enfants", affirme Lesley Bowes. Un outil pour lutter contre les agressions entre élèves, selon elle. Seules les portes des toilettes sont filmées, précise Lesley Bowes.

La Grande-Bretagne a installé des systèmes de vidéosurveillance dans les villes, gares et trains, mais même dans un pays plutôt favorable à la vidéosurveillance, avec 50.000 caméras, d'après Big Brother Watch, la surveillance dans les lycées fait figure d'exception.

Big Brother Watch estime que les élèves et le personnel des lycées britanniques sont ainsi filmés par plus de 100.000 caméras, et 90% des écoles reconnaissent l'usage d'une forme de vidéosurveillance.

La vidéosurveillance des lieux jugés "intimes" inquiète particulièrement les activistes. Le placement des caméras n'est pas toujours spécifié, on ne sait pas qui regarde ces vidéos et le risque de surprendre les jeunes en train de se déshabiller ou nus est élevé.

"Les images ne sont regardées que si un incident est signalé. Elles sont effacées après un délai de 30 jours", assure M.L. Litton, principal du Lycée de Wildern, dans le sud de l'Angleterre, équipé de caméra dans chacun des 12 W.C.

"Tout le monde savait pour les caméras dans les toilettes", raconte Jess Hogg, diplômée il y a un an du lycée d'Ecgbert. "Personnellement, ça me rendait un peu mal à l'aise, mais je me sentais en sécurité en même temps", ajoute-t-elle dans un échange de messages sur Facebook.

La commission de l'Information, une autorité indépendante en Grande-Bretagne qui a pour rôle notamment de protéger la vie privée, rappelle que filmer des toilettes ou des vestiaires est légal, mais qu'il est recommandé de ne le faire que dans des circonstances exceptionnelles.

Par comparaison, aux Etats-Unis, le département de la Justice estime que l'utilisation de caméras dans les écoles n'est pas autorisée dans les lieux où l'on peut "raisonnablement attendre de l'intimité", comme les sanitaires et les vestiaires.

Même si les agressions au couteau représentent un vrai problème dans les villes britanniques, le pays n'est pas confronté au port d'armes à feu dans les écoles, contrairement à ce qui se passe aux Etats-Unis. Les établissements américains ont ainsi dû s'équiper de détecteurs de métaux et autres systèmes de sécurité semblables à ceux des aéroports.

Le lycée d'Ecgbert affiche de bons résultats, son site Internet montre des salles de classe modernes et équipées de matériel dernier cri. Quant au lycée Wildern, spécialisé dans les arts, il se situe dans un quartier résidentiel de banlieue où s'alignent de belles maisons de briques, avec souvent plusieurs voitures dans l'allée.

Les deux lycées Ecgbert et Wildern ont reconnu que les caméras étaient plutôt destinées à repérer des "comportements typiques des adolescents", comme le fait de fumer, et non pas à régler des problèmes graves.

Le directeur de Big Brother Watch, Nick Pickles, ne se dit pas nécessairement contre la présence de caméras dans les toilettes mais il pense que les parents et les élèves doivent s'entendre pour mettre en place une autorité de contrôle du respect de la vie privée, afin de s'assurer que la surveillance ne viole par l'intimité des jeunes. La directrice du lycée Ecgbert, elle, affirme n'avoir reçu aucune plainte.
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